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Biodiversité

Prendre en compte la biodiversité dans tous les projets d'aménagement

Par Véronique Hollander • 1. Les fiches techniques • Mercredi 02/07/2014 • 0 commentaires • Version imprimable

1. Définition :

La biodiversité, c'est la diversité des espèces vivantes (micro-organismes, végétaux, animaux) présentes dans un milieu.
Elle se réfère à des notions telles que la complexité, la quantité, la rareté, la fréquence, la variabilité, l'appartenance d'une espèce à un milieu ou son exotisme par rapport à ce milieu. 
Elle recouvre autant la variété d'espèces différentes que la variété à l'intérieur d'une même espèce ou d'un même genre. Le nombre d'individus dans chaque espèce et sous-espèce a également une forte importance, en matière de biodiversité.



2.
Pourquoi s’en préoccuper ?
 
En quoi est-ce utile de se préoccuper de la biodiversité à l'échelle d'un seul projet d'urbanisation ? 
Votre réaction à l'enquête publique sera prise en compte lors de l'instruction de ce dossier ponctuel. Peut-être votre argumentaire en faveur de la biodiversité sera-t-il rejeté comme sans fondement sous prétexte que le site ne présente aucun intérêt sur le plan de la biodiversité ? Cela risque d'ariver.

Pourtant, votre argumentaire en faveur de la biodiversité a un fondement et, malheureusement, toute sa raison d'être, même si le site concerné par le projet est effectivement peu riche en espèces. En Wallonie, si plus de 30 % des espèces animales et végétales recensées sont menacées de disparition et près de 10% ont déjà disparu du territoire, c'est précisément parce qu'on ne se rend pas compte que ces espèces en danger dépendent de toutes les autres. Il reste du chemin à parcourir pour convaincre que la biodiversité se construit sur des écosystèmes en apparence banals.

La nature ordinaire, c'est à dire les animaux et les plantes que nous voyons souvent, font aussi partie de la biodiversité. Quand ils ont tendance à se faire rares par endroits, comme les moineaux à l'heure actuelle, nous prenons tout à coup conscience qu'aucune espèce, aucun individu, n'est "acquis". Chaque maillon protège la chaîne tout entière.

L'une des premières causes d'apauvrissement de la diversité et de la baisse du nombre d'individus est la SIMPLIFICATION des espaces, que ce soit par l'urbanisation - notamment 
le tracé de voies de communication carrossables - ou par la mise en culture sous forme d'exploitations monospécifiques. 

Exemple : Une pelouse uniforme est un milieu hostile à la biodiversité, à plus forte raison si on la tond fréquemment, qu'on la pulvérise de pesticides et qu'on l'enrichit d'engrais.

Le Rapport sur l'état de l'environnement wallon n'est pas optimiste en matière de biodiversité : la plupart des indicateurs sont très négatifs.

https://www.wallonie.be/fr/publications/rapport-sur-letat-de-lenvironnement-wallon-2017  (à télécharger sans délai, ce sera votre livre de chevet !)

Pour enrayer le déclin de la biodiversité à différents échelons, la Wallonie s'inscrit pourtant dans une dynamique de surveillance des écosystèmes incluant des comptages et la tenue d'une Liste Rouge : http://etat.environnement.wallonie.be/contents/indicatorsheets/FFH%205.html

Les données relatives à la biodiversité se retrouvent dans le chapitre Biodiversité du rapport. Elles sont également égrennées à travers tout le rapport, car les imbrications avec les autres compartiments d'analyse sont nombreuses et étroites. Allez voir les passages consacrés à la fragmentation des milieux dans le chapite territoire, les schémas comparant la qualité biologique des sols dans le chapitre agriculture, ou encore le bilan de l'état chimique des cours d'eau dans le chapitre consacré aux eaux de surface. Vous y trouverez des arguments pour soutenir votre point de vue.

Pour prendre en main le maintien et la restauration de milieux favorables à la biodiversité, c'est donc l'entièreté de notre manière d'utiliser les ressources et l'espace qui sont à revoir. C'est notre regard et notre discours sur la nature ordinaire qui doivent changer, si nous voulons changer le regard des autorités sur la biodiversité. L'un n'ira pas sans l'autre.

A ce titre, le rejet d'arguments en faveur de la biodiversité sera peut-être un jour reconnu comme une erreur manifeste d'appréciation...

       
 
3. Les principes généraux à défendre
 
  • Nous devons veiller à intégrer la conservation de la nature dans l'ensemble des politiques et secteurs d'activité : respect des zones à statut spécial comme Natura 2000, les réserves naturelles, les sites de grand intérêt biologique (SGIB)
  • Mais la protection de la nature doit se faire aussi en dehors de ces zones car le redéploiement de la biodiversité a besoin de l'ensemble du territoire, y compris des zones urbanisables et déjà urbanisées. 
  • Il est prioritaire de diminuer les impacts négatifs de toutes nos activités sur la biodiversité. 
  • Il est prioritaire de réaliser des aménagements favorables aux espèces et à la conservation de leurs habitats. 
  • Démolir un bâtiment existant cause à la biodiversité des dégâts que nous sommes seulement en train de découvrir.
  • Notre région doit mettre en œuvre un plan de sauvetage de la biodiversité dont l’ambition sera d’assurer la "croissance" de la biodiversité en restaurant l’intégrité et les fonctionnalités de nos écosystèmes. 

4. Les points importants à vérifier pour répondre à l’enquête publique
 
4.1. Préserver l'existant - Que dit le projet de la biodiversité du site, que veut-il en faire ?
  • Les premières questions à se poser sont celles de l'importance et de la valeur du site concerné par le projet :
- Est-ce que le site concerné par le projet contient ou fait partie d'une zone Natura 2000, d'un site de grand intérêt biologique, d'une réserve naturelle ? 
- Existe-t-il, à proximité, une zone Natura 2000, un site de grand intérêt biologique, une réserve naturelle ?
- Y a-il projet de faire du site (ou d'une partie du site) une zone Natura 2000, un site de grand intérêt biologique, une réserve naturelle ? 

Le site biodiversité de la région wallonne pourra vous fournir des bases pour cette recherche.
  • Pour analyser les incidences du projet pour les espèces et habitats, n’hésitez pas à contacter les associations naturalistes de votre région, leurs membres connaissent bien leur région et donc les espèces et habitats sensibles. Peut-être seraient-elles intéressées de prendre également part à l'enquête pour attirer l'attention de la commune sur les enjeux de biodiversité liés au projet.
  • Pour les communes qui ont un PCDN (plan communal de développement de la nature) ou un schéma de structure communal, vous pouvez consulter la cartographie du réseau écologique de votre commune. Vous trouverez un exemple ici.
  • N'hésitez pas à contacter l'éco-conseiller de votre commune pour avoir plus d'informations, sur le PCDN, et sur le projet. 
  • Et vous, quelle est votre impression sur le projet ? Que fait-il de la biodiversité en place ? Que dit-il de la nature ordinaire qui existe sur le site et alentours ? 


4.2  Encourager une meilleure prise en compte de la biodiversité locale et de s
a situation

Votre commune ne connaît peut-être pas bien sa biodiversité. Elle n'a peut-être pas non plus entrepris d'action pour améliorer sa situation.
Participer à une enquête publique sera pour vous l'occasion de marquer le coup et de montrer à votre commune que vous souhaitez qu'elle s'implique beaucoup plus dans la prise en compte de la biodiversité.

1. Connaître
Une connaissance de terrain, régulièrement entretenue et partagée permet déjà de travailler dans le bon sens. Ainsi que l’atteste le récent rapport dressé par IEW sur l’état de la biodiversité dans les communes wallonnes, "
il ne fait pas de doute que, pour connaître au mieux ce qui fonde son territoire, le moyen le plus solide est de l’arpenter, à pied ou en vélo, avec les acteurs de terrain : agriculteurs, forestiers, membres du contrat de rivière, grands propriétaires, associations, etc. »
Favoriser une bonne connaissance du territoire de la commune, cela peut passer par les outils tels que le plan de secteur, les fiches communales créées par la CPDT, les indicateurs locaux de l’IWEPS ou l’étude du réseau écologique pour les communes disposant d’un PCDN. Si vous estimez que votre commune doit mettre en oeuvre ces outils, donnez-vous la peine d'expliquer pourquoi : on a dépensé de l'argent public pour les concevoir et les approuver, maintenant il faut s'en servir. Ces outils proposent des critères généraux dans lesquels les caractéristiques locales et micro-locales peuvent ou non se retrouver : c'est l'occasion de définir des marqueurs spécifiques à votre commune, de découvrir des situations similaires dans des communes distinctes, parfois très éloignées sur le plan des distances en Km, et d'envisager des visites réciproques. La biodiversité est un atout, pas une calamité ! Pour rappel, l'humain en fait partie...

2. Agir
Il y a dix ans, seules trois communes wallonnes osaient se lancer dans la vie sans pesticides : Ath, Eupen et Rochefort. Cela leur faisait un beau point commun. Depuis, leur courage a été reconnu et elles ont été rejointes par d'autres communes.
Quelle que soit la situation locale de la biodiversité, elle ne pourra que se porter mieux si l'usage des pesticides est banni sur l'intégralité du territoire communal.
La route est cependant encore longue, notamment du côté des grandes cultures (maraîchage, céréales, betteraves et pommes de terre, entre autres). Ces plantations présentent justement des faiblesses liées à la monoculture à grande échelle : engrais chimiques et produits phyto-sanitaires, lessivage des sols, coulées de boue, eutrophisation des cours d'eau, aliénation entre producteur, terre de culture et consommateur. Accueillir la biodiversité revient dans ce cas à opérer un revirement total dans la philosophie agricole, puisqu'il faut découper l'open field en mosaïque de cultures variées, réintroduire les chaînons manquants de haies et de bosquets, oublier les labours profonds et les intrants industriels. 

Votre réponse à l'enquête publique pourrait se terminer par un encouragement à votre commune à suivre l'une de ces voies, ou à les suivre toutes.

4.3 Intégrer la biodiversité dans les projets d'aménagement
  • Promouvoir dans les projets d'aménagement toute les mesures qui participent à une meilleure prise en compte de la biodiversité. Le dossier Stop Béton d'IEW et ses huit balises militent pour un usage parcimonieux du sol en limitant les constructions aux zones déjà construites, en évitant les démolitions et donc en favorisant la réutilisation des bâtiments. Pour lire le dossier en ligne : https://www.iew.be/wp-content/uploads/2019/12/DossierIEW_StopBeton.pdf

  • S'abstenir de l'usage de tout pesticide dans un nouveau projet.
  • Concevoir, dans les projets de logement plurifamilial, de séniories et de résidences-services, à la fois des jardins privatifs ET un espace collectif géré dans le respect de la biodiversité. Cet espace devra être accessible à tous les habitants du bâtiment et jouer un rôle exemplatif, tourné vers le service aux habitants : verger fleuri avec plantations indigènes, coin compost, potager "en lasagne", poulailler, pelouse sauvage, arbres, buissons et haies, préau avec charpente pouvant accueilir des chauves-souris ou des rapaces nocturnes.  
Le projet prévoit-il d'intégrer la biodiversité ou pas ?  
 
4.4 Encadrer les mesures compensatoires si le projet en comporte
  • Compenser ne revient pas à monnayer son projet : compenser ne revient pas à pouvoir se permettre tout et n'importe quoi !
  • La compensation entre en jeu quand le projet lui-même ne peut être amélioré en termes d'impact sur l'étanchéification des sols ou de suppression de végétaux.
  • Les mesures de compensation consistent à prévoir, dans le permis, un espace ou des mesures favorables à la biodiversité dans ou en dehors du périmètre du projet. 
Exemple : pour un permis d'urbanisation de dix parcelles, une mesure compensatoire pourra être de prévoir une épuration collective extensive des eaux avec des roseaux en lagunage et une mare. Le projet devra donc réserver une superficie suffisante à cette installation à l'intérieur de son périmètre.
 
Le projet prévoit-il des mesures compensatoires et de quelle nature sont-elles ? Les pensez-vous suffisantes pour maintenir la biodiversité ?

4.5 S'assurer de la pérennité des mesures de protection de la biodiversité

Le permis n'est pas garant de la manière dont le projet sera utilisé, une fois construit ; mais votre argumentaire pourra indiquer que vous y serez attentif. Vous pouvez donc,
 en tant que personne sensibilisée aux enjeux de la biodiversité, communiquer à l'auteur de projet et à l'autorité compétente, via votre réponse à l'enquête publique, leurs devoirs en termes de biodiversité, dans le cadre de la mise en oeuvre du permis et au-delà de l'autorisation du projet.
 


5. Associations qui ont fait l'expérience du sujet

Adalia
, pour les questions « quartiers en santé, sans pesticides »
Le pôle de gestion différenciée, pour l'accompagnement des communes dans une gestion des espaces verts sans pesticides

Le CADEV
Action environnement Beauvechain
Lasne Nature
Les Amis du Parc de la Dyle
Natagora et ses locales


6.
Documentation
 
6.1 Codes et liens législatifs
  • le site de la DGRNE : cliquer sur l'onglet « législation », ensuite, « nature et forêt » et enfin « conservation »
6.2 Sources d'informations et d'

 Fédération Inter Environnement Wallonie
Adesa Action Environnement Beauvechain
Cadev Villers-La-Ville
Environnement Dyle
Lasne Nature
Epures  (Brabant wallon)
Ce site a été réalisé gracieusement par EPURES ASBL (Observatoire indépendant de l'environnement en Brabant wallon). Le contenu des fiches a été élaboré par les membres de l'équipe permanente de la Fédération Inter-Environnement Wallonie (IEW) et les bénévoles des associations à la base de cette initiative.